Notre lettre 205 publiée le 21 novembre 2009

2è RENCONTRE POUR l’UNITE CATHOLIQUE : LE MOTU PROPRIO SUMMORUM PONTIFICUM, UNE CHANCE POUR L'ÉGLISE ?

Plusieurs centaines de personnes ont participé au Palais des Congrès de Versailles à la 2è rencontre pour l’Unité Catholique, organisée par REUNICATHO, mouvement spontané de fidèles catholiques de différents diocèses attachés à la célébration de la messe selon la forme extraordinaire dans leurs paroisses.
 
2 ans après la publication du Motu Proprio Summorum Pontificum, les organisateurs avaient souhaité faire le point, tant du côté des « spécialistes » de la forme extraordinaire, que du côté de l’application dans les diocèses.
 
Une première table ronde a montré l’importance du travail missionnaire des communautés traditionnelles, leur spécificité et leur unité dans la diversité, à l’heure où démarrent à Rome des discussions théologiques avec la FSSPX, discussions doctrinales intéressant toutes ces maisons et même toute l'Eglise. La totalité des communautés spécialisées (selon l’expression du Cardinal Castrillon Hoyos) présentes en France, en parfaite communion avec le Saint Siège, étaient présentes : les Chanoines Réguliers de la Mère de Dieu (Lagrasse), la Fraternité Saint-Pierre, la Fraternité Saint-Vincent-Ferrier, l’Institut du Bon Pasteur, l’Institut du Christ-Roi Souverain-Prêtre, l’Institut de la Sainte-Croix de Riaumont et la Société Missionnaire de la Divine Miséricorde. Le Père Augustin, des Chanoines de Lagrasse, fit un très bel exposé sur les richesses de la forme extraordinaire, s’appuyant sur de nombreux témoignages de nouveaux pratiquants, qui viennent de découvrir ce trésor liturgique.
 
En début d’après-midi, Luc Perrin, historien et professeur d’histoire de l'Eglise à la faculté de théologie catholique de l'Université de Strasbourg (1) dressa un bilan extrêmement précis de l’application du Motu Proprio dans le monde et particulièrement en France, montrant à travers tous les chiffres cités que s’il y avait une progression notable des messes selon la forme extraordinaire (121 messes dominicales en juillet 2007, 190 en juillet 2009) dans l’ensemble des diocèses (excepté 6 d’entre eux, dont l’important diocèse de Saint Denis), il y avait encore de nombreux freins dont un, par exemple : aucune paroisse personnelle n’a été érigée en France depuis le 7 juillet 2007.
 
Deux tables rondes permirent de faire un bon tour d’horizon : la première réunissait l’abbé Loiseau, supérieur de la Société des Missionnaires de la Miséricorde, incardinée dans le diocèse de Toulon : les séminaristes de cette institution sont formés dans le séminaire du diocèse, seul séminaire de France à ce jour, à admettre des séminaristes se destinant à l’une et l’autre forme du rite. Sur le sujet, Luc Perrin avait souligné un peu avant qu’il y avait en moyenne environ 4 prêtres par diocèse (c'est-à-dire environ 400 prêtres diocésains) à avoir été formé ces deux dernières années à la forme extraordinaire. A noter que cette information montre que la France est très en deçà des attentes du cardinal Castrillon Hoyos en 2008, alors Président de la Commission Ecclesia Dei, qui avait indiqué que le Motu Proprio impliquait une formation dans tous les séminaires.

Dans le même groupe François Foucart, ancien chroniqueur religieux à France Inter, Président de l’association les Enfants du Mékong, Olivier de Durat, Président de l’association Notre-Dame de Chrétienté organisatrice du pèlerinage de Paris-Chartres, le Père Alain Hocquemiller de l’Institut de la Sainte Croix de Riaumont, Michel Tauran, membre d’Una Voce France et l’Abbé Evrat, Secrétaire général de la Fraternité Saint Pierre pour le monde entier présentèrent un "bilan" de l'application du Motu Proprio : un " bilan" en demi-teinte précédé par le témoignage de 3 demandeurs de l’application du Motu Proprio dans les diocèses de Sées, de Pontoise et de Versailles ainsi qu’un témoignage d’une mère de famille ayant souffert depuis 40 ans, de la division dans sa famille et dans sa paroisse, qui appelait à une charité sans faille entre tous les catholiques. Toutes les interventions démontrèrent que la route est encore longue avant de voir se réaliser la volonté du Saint Père, de voir célébrer dans chaque paroisse une messe selon la forme extraordinaire. Cette volonté de Benoît XVI fut rapportée par le cardinal Castrillon Hoyos, légat du Pape, lors de son voyage pour le 25e anniversaire du pèlerinage de Chartres en décembre 2007.
 
La deuxième table ronde permit d’engager un débat sur l’avenir du Motu Proprio. L’abbé Christian-Philippe Chanut, prêtre du diocèse d’Evry en charge de la forme extraordinaire souligna que les fidèles attachés à la liturgie traditionnelle n’étaient plus dans une situation d’assiégés, et que de ce fait, ils devaient avoir toute leur place dans les paroisses… Aux propos de Jean-Pierre Maugendre, Président de Renaissance Catholique, qui rappelait combien de nombreux prêtres, aujourd’hui certainement nos intercesseurs dans l’œuvre que nous menons, avaient été en quelque sorte martyrisés depuis 40 ans, Philippe Oswald répondit qu’il lui semblait qu’il ne fallait pas « regarder dans le rétroviseur », mais aller de l’avant : pour ce faire, le Directeur de la rédaction de Famille Chrétienne incita tous les participants à lire le tout récent ouvrage de Mgr Nicola Bux, Consulteur de l'Office des cérémonies liturgiques du Souverain Pontife, La réforme de Benoît XVI. La liturgie entre innovation et tradition. Il fut aussi question de la TAC (Traditional Anglican Communion) et du retour historique à Rome, ces dernières semaines, d’Anglicans. Un exemple qui donne raison au choix de Benoit XVI de se battre pour l'unité catholique, à savoir pour le retour des séparés vers l’Église du Christ, et non pour un faux œcuménisme qui ne voudrait plus entendre parler de « retour » et de « conversion ». Le dernier mot fut laissé à l’abbé Loiseau qui rappela la nécessité de s'unir pour partir en mission en insistant sur l'enrichissement mutuel… qui passe bien entendu en premier lieu par l'ouverture des paroisses aux richesses de la forme extraordinaire.
 
 
La rencontre fut conclue par l’un des organisateurs de la journée qui lança un appel fort à la mobilisation et à l’unité "N'ayez pas peur" : appel à la mobilisation pour que les fidèles demandeurs de messes selon la forme extraordinaire aillent au devant de leurs curés et des fidèles qui les entourent pour demander l'application large et généreuse du Motu Proprio Summorum pontificum, fixant un objectif – très raisonnable, et même modeste, compte tenu des indications données par les sondages sur la demande des catholiques pratiquants – à 1000 messes l’an prochain, alors qu’aujourd’hui il n’y en a qu’un peu plus de 350 célébrées le dimanche en France dans les paroisses. Appel aussi à l'unité car avec moins de 5% de catholiques pratiquants en France, il est temps d'unir les forces de tous les catholiques, de cesser ces querelles liturgiques stériles pour travailler ensemble à la nouvelle évangélisation.



Commentaires de Paix Liturgique
 

1 - Encouragements du Cardinal Barbarin
 
Les encouragement du Cardinal Barbarin, archevêque de Lyon, qui a voulu souhaiter "un bon succès à ce rassemblement" et a assuré de sa prière "tous ceux qui œuvrent à la réconciliation entre tous les catholiques" constituent un signal fort qui a été salué par l'ensemble des participants.
Cet appui de la part du Cardinal Barbarin a incontestablement situé ce colloque dans la dynamique de réconciliation et d'apaisement désirée par le Saint Père.
Comparé au silence - apparent seulement - de l'évêque de Versailles, Monseigneur Eric Aumonier (qui a fait tout ce qu'il a pu en sous-mains pour dissuader les uns et les autres de participer à ce rassemblement), ce soutien du Cardinal Barbarin révèle une fois encore les dissensions au sein de la Conférence Episcopale entre ceux qui désirent la paix et veulent suivre le Saint Père et les conservateurs qui préfèrent maintenir les situations d'exclusion, de monopole et de privilèges. Deux visions de l'Eglise en somme.


2 - Enthousiasme et unité

Le second point que l'on retiendra est la communion d'unité et de solidarité entre tous les participants qu'ils soient clercs ou laïcs.
Un signal envoyé aux évêques de France ? La famille "traditionnelle" est en effet apparue soudée et dynamique.
Lors de leurs interventions, les représentants des communautés ont insisté sur la richesse qu'apportait à l'Église la diversité.
L'Église ne peut pas se priver de ce souffle parmi d'autres que représente la célébration de la forme extraordinaire dans les paroisses.
Cette liturgie ne doit pas être source de peur ou d'inquiétude dans les diocèses de France. Au contraire, l'application du Motu Proprio dans les paroisses permettra enfin aux catholiques de se reparler, de travailler à nouveau ensemble et de s'enrichir mutuellement : les paroisses en acceptant l'enrichissement qu'apporte la forme extraordinaire du rite romain, les fidèles attachés à la messe traditionnelle en unissant leur force pour proposer partout leur collaboration dans l'œuvre missionnaire de l'Église.
 

3 - Détermination

Le troisième signal fort fut celui de la détermination des fidèles à aller de l'avant et à ne pas se satisfaire de la globale non réception du Motu Proprio de Benoît XVI par les évêques de France. Demander au curé, à l'évêque puis à la Commission Ecclesia Dei, communiquer... L'application du Motu Proprio est apparue comme n'étant pas une matière à option mais comme une responsabilité, un devoir pour les fidèles.
Rien que pendant le colloque près d'une demi-douzaine de groupes nouveaux se sont initiés.
Dans cet esprit nous avons particulièrement apprécié la déclaration de Philippe Oswald, Directeur de la Rédaction de Famille Chrétienne nous invitant à aller de l'avant dans l'esprit de l'excellent ouvrage de Monseigneur Nicolas Bux - La Réforme de Benoît XVI, aux éditions Tempora – en demandant d’apprécier la belle préface de Monseigneur Marc Aillet et en faisant remarquer que la magnifique préface pour l’édition espagnole était donnée par le Préfet de la Congrégation pour le Culte divin lui-même, le cardinal Canizares.
En conclusion, un des organisateurs de la journée a appelé les fidèles à faire des demandes dans les 4.500 paroisses de France.
Dans cette perspective notre décision de faire réaliser dans les prochains mois, des sondages par diocèse permettra peut-être à la presse - tant religieuse que profane - de se pencher enfin sur ce dossier. Comptez d'ores et déjà sur nous pour en communiquer abondamment les résultats en temps voulu.
 

4 - Rayonnement international

Le colloque se déroulait en même temps que la réunion des sections internationales de la fédération internationale d'Una Voce où il fut annoncé la création de nombreuses nouvelles sections dans des pays jusqu'alors "étrangers" à la forme extraordinaire comme Cuba, Le Honduras et l'Ukraine Cette dimension internationale ne fut pas absente du colloque où nous eûmes la joie de rencontrer plusieurs participants européens particulièrement intéressés à tenter l'aventure dans leurs pays respectifs comme le Portugal ou l'Irlande.
 

5 - Annonce de l'ouverture en France d'un séminaire totalement bi-formaliste

Temps particulièrement fort lorsque l'abbé Spriet, du diocèse de Versailles, membre de l’association Totus tuus, a annoncé l'ouverture à Lyon l'an prochain d'un séminaire bi-formaliste, en ce sens qu’y sera aussi pratiquée et enseignée la célébration de la forme extraordinaire du rite romain.
A la suite du désormais très célèbre diocèse de Toulon - qui depuis qu'il a décidé de former également des séminaristes selon la forme extraordinaire, attire de plus en plus de jeunes vocations - un nouveau séminaire diocésain français tiendra donc compte des réalités de l'Eglise de notre temps en offrant la possibilité aux séminaristes de se former avec les richesses de cette forme liturgique.
Le projet de Mgr. Barbarin va même encore plus loin que l'exemple de Toulon puisque non seulement des séminaristes pourront être formés selon la forme extraordinaire du rite romain, mais en plus, la messe traditionnelle sera célébrée chaque jour dans le cadre du séminaire et donc accessible à tous les séminaristes (y compris ceux de la forme ordinaire).
A quand l'équivalent à Paris ou à Versailles ?
 
C'est donc avec satisfaction que nous avons entendu les animateurs de cette réunion nous donner rendez-vous pour l'automne 2010 pour participer à un troisième colloque qui s'annonce déjà plus national et européen car l'attachement à la forme extraordinaire n'est pas, contrairement à ce qu'affirment les adversaires de la Paix une affaire franco-française… mais bien un vœu que l'on retrouve dans toute la catholicité latine.

(1) Parmi les ouvrages de Luc Perrin : L'Affaire Lefebvre (Cerf/Fides), participation à la monumentale Histoire du Concile Vatican II éditée par G. Alberigo (Cerf/Peeters), Traditionalisme catholique (dictionnaire Catholicisme), Paris à l'heure de Vatican II (Editions de l'Atelier).

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