Notre lettre 991 publiée le 26 décembre 2023

MAUVAISE FOI A TOUS LES ETAGES
DANS LE DIOCESE DE QUIMPER



Suite aux publications de fin novembre et de début décembre sur Paix Liturgique, bien des intervenants – notamment côté diocèse – sont prêts à taper dessus pour cacher leurs propres défaillances... quitte à donner raison à nos lettres deux paragraphes plus loin. En réalité, tant curés qu'évêque prennent leurs fidèles pour des lapins de six semaines... et s'étonnent ensuite que les Bretons votent avec les pieds en s'éloignant le plus possible de leurs églises, pastorales et autres propositions diocésaines...


Le bug de l'an 2000 du prêtre hyper-connecté

Ainsi, Erwan de Kermenguy, décrit par la presse locale comme un « prêtre hyper-connecté qui roule à trotinette, écrit sur Facebook, s'informe sur Twitter » au moment de son ordination – depuis 2021 il est curé de Landerneau, fait un long post Facebook pour regretter, début décembre, le temps où les tradis n'existaient pas à Quimper – et pour cause, ils faisaient 45 km pour aller au Trévoux (FSSPX).

« J’ai bien connu la paroisse de Quimper avant que la FSSP n’y arrive. J’étais vicaire à la cathédrale de Quimper jusqu’à leur arrivée, date à laquelle j’ai été nommé à l’autre bout du diocèse. […] Le moins qu’on puisse dire c’est qu’il n’y avait pas alors de communauté « tradi » à Quimper ( Voir notre note à ce sujet ) Il y avait une paroisse, où tous se retrouvaient dans la diversité de leurs attaches ecclésiales (Opus Dei, Emmanuel, MEJ, action catholique). […] Après 7 années de présence de la FSSP à Quimper, les chrétiens sont on ne peut plus divisés »

Mais à peine dix lignes plus loin il vend la mèche sans détour : « j’étais aumônier de lycée à Quimper jusqu’en 2016. Le pôle jeunesse, ce local situé place de la Tour d’Auvergne, dont parle l’article était trop petit pour accueillir les groupes de jeunes qui s’y retrouvaient. Certains soirs, à l’aumônerie du lycée public, il y avait jusqu’à 70 élèves. S’il y a eu un changement depuis [doux euphémisme pour un effondrement des effectifs], il n’est pas à imputer au P.Laurent [...] mais bien à nos confrères de la FSSP, qui ont développé en sous-main une pastorale clandestine. Ils n’avaient pourtant reçu aucun mandat de l’évêque pour exercer un ministère en pastorale des jeunes. L’évêque nous avait assuré, en les nommant à Quimper, qu’ils ne viendraient que pour célébrer la messe le dimanche matin ».

« Mais à Quimper, de même qu’à Brest où j’ai pu le constater lorsque l’abbé tradi à ouvert une aumônerie d’étudiants parallèle à celle dont j’avais la charge (sans mandat de l’évêque ni de son curé), le monde tradi s’abrite derrière la question liturgique pour développer en fait une paroisse parallèle… pour ne pas dire une Eglise parallèle ».


Les lois de la Bourse pour diriger la pastorale

Il est plus simple de crier au complot et à la contre-église que de reconnaître que les jeunes finistériens n'ont que faire des propositions diocésaines pour les jeunes... ils préfèrent aller dans la Tradition, et pour l'immense majorité d'entre eux, hélas, ne se sentent plus concernés du tout par le diocèse de Quimper, son évêque, ses prêtres et ses aumôneries. Mais il est encore plus facile de taper sur ceux qui l'écrivent... ou qui sont différents.

Ah, le bon temps sans les tradis – le curé de Landerneau insiste, en convoquant les lois du marché pour conforter son raisonnement défaillant : « l’offre crée la demande. Je le redis, il n’y avait pas de communauté tradi à Quimper en 2016 lorsque la FSSP s’y est installée. Cette arrivée était donc contraire aux Motu Proprio de St Jean-Paul II et de Benoit XVI : il n’y avait pas de communauté stable de fidèles attachée à la messe en forme extraordinaire. Si près d’un quart des fidèles de St Matthieu viennent à la messe à pied, comme l’affirme l’article, c’est donc qu’ils allaient jusque là à la messe à la cathédrale, en forme ordinaire. Au lieu de promouvoir l’unité du rite romain, la FSSP l’a donc mise à mal ».

Au même moment, Mgr Dognin à peine arrivé se faisait imposer par ses collaborateurs une réorganisation du diocèse en 20 immenses paroisses qui laissaient un grand nombre de finistériens dans l'incapacité, définitive, d'aller à l'église où ont lieu les messes autrement qu'en voiture, loin.


Les médias ne dirigent pas le diocèse de Quimper... mais il agit d'après les médias

Et de s'interroger – quelques jours avant que le Pape ne publie un texte légitimant des bénédictions pour les couples de même sexe qui ne contente personne, et encore moins les intéressés – « Qui donc garde la tradition ? Le pape ou les tradis ? L’article s’interroge « qui dirige le diocèse de Quimper ? » Mais nous devrions répondre : qui dirige l’Eglise ? C’est le pape et les évêques (cum et sub petro). Ce ne sont ni les medias, ni les réseaux sociaux, ni les pétitions ».

En tapant sur des publications, il accepte pourtant – comme son évêché dans le communiqué du 18 décembre – que ce sont eux qui font l'actualité du diocèse, et qui engendrent ses décisions. Contradiction encore, comment les fidèles pris pour des ânes (de crèche, c'est de saison) peuvent arriver à suivre ?

Un peu plus bas, encore des paragraphes qui se contredisent. Ainsi, il écrit d'abord : « Le pape François nous redit qu’il faut veiller à pourvoir au bien de ceux qui « ont besoin de temps pour revenir au Rite romain promulgué par les Saints Paul VI et Jean-Paul II ». Le message est clair : il faut, à terme, que tous se retrouvent dans l’unique rite romain. Ce n’est clairement pas l’objectif poursuivi par nos confrères de la FSSP ». Puis, trois lignes plus loin, « l’unité de l’Eglise n’est pas l’uniformité ».

Pour certains curés progressistes et « ultra-connectés », ça vaut la peine de taper sur Zemmour et encenser l'accueil des immigrés... pour conclure à chaque ligne, que le coupable, c'est l'Autre, le différent, celui qui ne célèbre pas la messe pareil...


Garde-frontières liturgiques

La contradiction est aussi dans les faits. Ainsi, Mgr Dognin a fait l'éloge de l'immigration en France, et de l'accueil des immigrés, lorsqu'il était à la CEF et à la tête du diocèse de Quimper. Mais lorsque des prêtres carmes brésiliens en rupture de diocèse ont été accueillis par un châtelain des environs de Morlaix qui a mis à leur disposition sa chapelle du XVIIIe d'une cinquantaine de places, et qu'ils s'y sont mis à célébrer la messe – en rite traditionnel – tous les jours de semaine et le dimanche – des esprits « éclairés » au sein du diocèse ont fait valoir à la préfecture que lesdits prêtres étaient en situation irrégulière. Laquelle, très amusée par ce soudain revirement, a fait comprendre son peu d'empressement de faire une reconstitution des expulsions de congrégations en 1905 qui avaient alors tant alarmé la Bretagne.


L'évêque a la charge des âmes... mais il se défile

Cri du cœur d'une fidèle de saint Matthieu : « dans les articles qui sont sortis, tout est vrai ! ». Seulement, « les mous se sont braqués ». Quitte à nier les évidences, et refuser même de venir assumer leurs choix. D'après le curé de Landerneau, qui porte la charge des âmes ? « C’est l’évêque dans le diocèse, les curés dans les paroisses, les aumôniers dans les aumôneries ».

L'évêque s'est défilé pour ne pas avoir à écouter les fidèles de saint Matthieu, et y a envoyé son chancelier lire une lettre aussi impersonnelle qu'accusatrice, telle un blâme d'un sous-préfet à ses administrés, qu'il fait lire sur la place du marché, au milieu des camelots, par le crieur public.

Quant au curé de la cathédrale, il a préféré ce dimanche débiter une homélie qui contredisait encore son action : « on ne peut pas rester insensible au fracas du monde », et il y critiquait ce rat de la fable qui se retire du monde dans un gros fromage de Hollande...comme un recteur de cathédrale dans son vaisseau de granit et de vitraux.

Encore le plumitif a la présence d'esprit de ne pas envoyer sur les roses les concitoyens qui trouveraient ce blâme injustifié, en leur proposant par exemple de prendre la nationalité italienne ou russe s'ils ne sont pas contents de sa prose.

Hé bien les « têtes pensantes » du diocèse de Quimper si – ceux qui ne sont pas d'accord ou ont quelque chose à redire peuvent toujours aller chez les « schismatiques », autrement dit la FSSPX. Aucune raison de les écouter. Après tout, il reste encore 400 fidèles à la cathédrale – l'assistance moyenne dans la seule église de saint Matthieu quelques années avant le Concile –, à ce rythme, la paroisse de Quimper et agglomération peut encore prolonger son agonie pendant dix ans.

Dans cette lettre dont la forme proteste contre le fond, l'évêque a beau jeu de taper sur les mêmes lampistes et d'affirmer que « sa décision n’est pas un blâme adressé aux abbés Courtois et Télisson, mais le constat de tensions irréversibles mettant à mal l’unité du diocèse ». Elle l'est – ainsi que le constat de son impuissance, y compris à venir défendre et assumer des choix qui ne sont peut-être pas les siens. La question du curé de Landerneau est bonne, mais examiner les faits empêche d'y apporter la réponse. Dans le diocèse de Quimper, qui porte la charge des âmes ?


Eglises fermées, à vendre, à l'abandon : la déchristianisation inéluctable de Brest

Pendant que le 18 décembre le diocèse de Quimper mettait la dernière main à un communiqué entérinant l'expulsion d'une des rares communautés et paroisses florissantes (250 fidèles l'hiver, le double l'été), Breizh Info publiait l'article de Christian Le Gall, un vrai léonard , un habitant du nord du Finistère, le Léon, l'ancien diocèse de Saint-Pol, sur l'inéluctable recul de la chrétienté à Brest, à travers le sort peu enviable de nombre de ses clochers.

Il mérite là encore d'être lu en entier – quand le diocèse de Quimper refuse d'écouter les médias et les fidèles, il refuse de remettre en cause ses erreurs passées qui entérinent aujourd'hui déjà la déchristianisation de la seule grande ville du diocèse, et éclaire d'un autre jour l'expulsion de la FSSP. Les publications ne sont qu'un prétexte, ce qui lui est reproché, c'est justement son succès, y compris auprès des jeunes.

Les liquidateurs n'ont que faire de l'histoire sociale bretonne, du Léon, de Recouvrance, de Quimper, il leur suffit d'organiser quelques pardons pour maintenir les apparences, et vendre ou démolir le reste. Citons maintenant Christian Le Gall.

« La civilisation bretonne, en particulier dans le diocèse de St Pol de Leon, a pu être qualifiée de « civilisation paroissiale ». Organisation de l’espace diffusée depuis le haut Moyen Âge par l’Eglise Catholique : la paroisse désigne une communauté stable de fidèles dont la charge pastorale est confiée au curé, lui-même placé sous l’autorité de l’évêque diocésain.

C’est très tôt, dans le Leon médiéval que le duc Jean le Roux confie à l’évêque de St Pol le pouvoir politique, en transférant le titre de comte à l’évêque et en créant un titre inédit d’« évêque-comte ». Les Léonards échappent ainsi précocement, dès le XIIIe siècle, au régime féodal pour entrer dans une société organisée peu à peu autour d’institutions religieuses : chapelles, pardons, églises, fabriques, enclos.

Cette histoire particulière explique la place centrale de l’église dans notre culture léonarde et bretonne. C’est plus qu’un édifice de culte : elle est aussi le lieu de rassemblement des croyants pour les fêtes et pour les rites de passage (baptêmes, mariages, enterrements), et le point névralgique autour duquel s’organisent la socialisation et les échanges.

L’importance de ces églises est encore très prégnante après-guerre, la paroisse urbaine reprend en ville un modèle hérité du monde rural, jusque tard dans le 20e siècle (voir la reconstruction des églises de quartier à Brest).

Cependant, suite aux changements majeurs de notre société depuis 60 ans c’est la bascule civilisationnelle. Depuis le dernier Concile et la tentative de réconciliation de « la religion du Dieu qui s’est fait homme avec la religion de l’homme qui se fait Dieu », pour reprendre les termes du discours de clôture Paul VI, les croyants bretons s’éloignent à pas feutrés des autels, des églises et de toute la vie sociale qui les environnait.

« Quand le Fils de l’Homme viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? » Luc 18 :8

Les conséquences immobilières pour le diocèse commencent à se faire sentir depuis quelques années. C’est en 2011 dans le quartier de Bellevue que pour la 1ere fois une église, dédiée à St Yves, est officiellement à vendre. Depuis quelques semaines, le diocèse cherche à se séparer de l’église St Jacques. A Keraudren, la chapelle est en cours de démolition. La communauté catholique attachée au rite traditionnel s’est pourtant portée candidate au rachat pour faire revivre ces lieux de culte. Sans retour du diocèse.

Face au recul de la spiritualité et de la sociabilité qui en découlait, ces édifices dont la nécessité semblait évidente il y a 60 ans sont devenus rapidement obsolètes. D’autres églises brestoises sont fermées pour travaux depuis des années, notamment l’emblématique église St Martin, principal clocher que les navigateurs de la rade prennent pour repère. Elle est fermée depuis 6 ans « pour travaux » sans aucune de communication de la municipalité sur son devenir (réouverture ?). Idem pour l’église historique de Recouvrance : St Sauveur.

Prions pour que notre société bretonne relève la tête, s’éloigne du matérialisme qui ronge son âme. Qu’elle retrouve la foi de ses aïeux, remplisse à nouveaux les nefs célestes. Espérons qu’elle bénéficie ainsi des bienfaits temporels et spirituels qui en découlent"


NOTA BENE

En 2007 il se trouvait en France un peu plus de 4000 paroisses dont moins de 10% proposaient de bon ou de mauvais gré une liturgie traditionnelle à leurs fidèles.

Dans les mois qui suivirent la promulgation du motu proprio Summorum Pontificum du 7 juillet 2007 Paix liturgique eut connaissance de plus de 700 groupes de fidèles qui sollicitèrent leurs pasteurs afin de bénéficier des privilèges qu'accordait le texte du Pape Benoit. Bien évidement Paix liturgique ne peut en aucun cas prétendre avoir eu connaissance de toutes les demandes qui ont été entreprises...

Cependant, les sondages qui ont été commandés entre 2007 et 2012 indiquent très clairement qu'un quart au moins des fidèles catholiques pratiquants auraient volontiers souhaité vivre leur Foi catholique au rythme de la liturgie traditionnelle si celle-ci était proposée dans leur paroisse.

Nos pouvons donc en conclure que dans toutes les paroisses de France des demandes explicites, ou au moins implicites ,ont vu le jour ne serait-ce que dans le cœur des fidèles.

La remarque exprimée dans la citation du père Erwan de Kermenguy prend donc une tout autre dimension. En effet, qu'il y eut ou non un groupe de "tradis" déclaré avant l'arrivée à Quimper des prêtres de la Fraternité Saint-Pierre importe peu... mais explique parfaitement que celle-ci, en s'installant, a attiré vers elle et son apostolat ces 25 % de fidèles plus ou moins silencieux qui souhaitaient son arrivée afin de bénéficier des richesses liturgiques et catéchétiques qu'elle apportait.

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