Notre lettre 816 publiée le 20 août 2021
MOTU PROPRIO "TRADITIONIS CUSTODES"
ET MAINTENANT ?
APRES LA MESSE TRADITIONNELLE ...
LES SEMINAIRES TRADITIONNELS
Nous n’aurons pas longtemps à attendre pour savoir comment le Motu Proprio Traditionis Custodes – dont on appréciera en passant le choix des deux premiers mots : « Les Gardiens de la Tradition », c’est-à-dire les évêques, clin d’œil à la « synodalité », contre Summorum Pontificum, « des Souverains Pontifes » – sera appliqué.
En France et dans la plupart des pays où la « tradition » est bien implantée, ce qui existe déjà n’est pas encore menacé. Il en va tout autrement des futures mises en place de messes traditionnelles. Ce qui était en projet risque d’être reporté sine die. Pour ce qui devait être mis en place à la rentrée de septembre, il sera intéressant d’observer au cas par cas ce que vont finalement faire les évêques diocésains.
Mais il est un point très sensible de l’application de ce Motu Proprio dont on parle peu pour le moment : il concerne les séminaires traditionnels. Puisque l’intention du Pape est de stopper le développement de la messe traditionnelle et de réduire progressivement son existence, la mise au pas des maisons de formation sera sans doute un objectif prioritaire pour les commissaires chargés de son exécution.
Les dernières visites canoniques « à charge » à l’encontre des communautés et des séminaires ont laissé des traces, provoqué des réactions et devraient être médités par ceux qui s’apprêtent à venir inspecter les séminaires. Les maisons de formation visées (celles des Franciscains de l’Immaculée en 2013, celle d’Albenga en Italie, de San Rafael en Argentine) étaient pourtant bi-ritualistes ou simplement conservatrices : on a été sans pitié pour elles. Mais la dernière « visite » contre un séminaire célébrant la messe traditionnelle est celle qui eut lieu... à Ecône en 1974. Et cet exemple historique est très instructif.
Le 11 novembre de cette année-là, deux visiteurs apostoliques sont mandatés par trois congrégations romaines pour inspecter le séminaire de la Fraternité Saint-Pie-X naissante. Il s’agissait de Mgr Albert Descamps, secrétaire de la Commission biblique, et de Mgr Guillaume Onclin, secrétaire adjoint de la Commission pour la révision du code de droit canonique.
Les visiteurs passèrent trois jours à Ecône pour interroger professeurs et séminaristes. Ils leur tinrent des propos pour le moins curieux. Ainsi trouvaient-ils inéluctable l’ordination d’hommes mariés. Ils n’admettaient pas de vérité immuable et émettaient même un doute sur la réalité physique de la Résurrection du Christ. Ils se retirèrent sans avoir assisté à aucun office et sans faire aucun compte-rendu au supérieur de la Fraternité.
Mgr Lefebvre se rendit à Rome le 16 novembre pour visiter des Congrégations. Mais comprenant qu’il n’y avait plus grand-chose à attendre pour l’heure, et pour anticiper des sanctions qu’il prévoyait, « dans un mouvement d’indignation » comme il le dira, il rédigea d’une traite la célèbre lettre du 21 novembre 1974 dont nous reproduisons le texte ci-dessous.
Le ton de la lettre servit de prétexte aux autorités romaines pour prononcer la dissolution de la FSSPX et la fermeture du séminaire, mais le fond du problème était le choix exclusif de la messe traditionnelle et la critique du Concile Vatican II. Dans un sermon du 29 juin 1976, Mgr Lefebvre révéla d’ailleurs qu’il lui avait été dit : « Si vous concélébrez une messe avec nous, Monseigneur, il n’y aura plus aucun problème entre vous et Rome ».
L’on connait la suite avec le développement international de ladite Fraternité et son statut très spécial – reconnaissance officieuse avec dotation de pouvoirs sans reconnaissance officielle – accordé par S.S. François lui-même...
50 ans après, si les séminaires traditionnels sont sur le point, eux aussi, d’être passés en coupe réglée pour ce qui fait leur spécificité liturgique. Sans parler des réactions probables de cardinaux et d’évêques, qui peut croire une seconde que les fidèles dans le monde entier resteront les bras croisés, alors qu’ils sont nombreux à bénéficier, habituellement ou occasionnellement, de la présence de prêtres issus de ces maisons ?
L’histoire dira plus ou moins rapidement combien ce Motu Proprio fût finalement providentiel ; mais à la condition que les fidèles se manifestent et témoignent, pacifiquement et résolument pour sauver ce qu’ils ont obtenu par leur détermination depuis le Concile.
Il est peut-être difficile de se déplacer à Rome pour soutenir notre cause, mais nous pouvons exprimer notre colère et notre détermination en direction du représentant du pape en France, devant la nonciature en France ou ailleurs…Manifestation tous les samedi de 12 à 13 h 14 bis avenue du président Wilson à Paros ( M° Alma Marceau)
La déclaration du 21 novembre 1974 : « Sans aucune rébellion, nous poursuivons notre œuvre de formation sacerdotale »
Nous adhérons de tout cœur, de toute notre âme à la Rome catholique, gardienne de la foi catholique et des traditions nécessaires au maintien de cette foi, à la Rome éternelle, maîtresse de sagesse et de vérité.
Nous refusons par contre et avons toujours refusé de suivre la Rome de tendance néo-moderniste et néo-protestante qui s’est manifestée clairement dans le concile Vatican II et après le concile dans toutes les réformes qui en sont issues.
Toutes ces réformes, en effet, ont contribué et contribuent encore à la démolition de l’Eglise, à la ruine du Sacerdoce, à l’anéantissement du Sacrifice et des Sacrements, à la disparition de la vie religieuse, à un enseignement naturaliste et teilhardien dans les Universités, les Séminaires, la catéchèse, enseignement issu du libéralisme et du protestantisme condamnés maintes fois par le magistère solennel de l’Église.
Aucune autorité, même la plus élevée dans la hiérarchie, ne peut nous contraindre à abandonner ou à diminuer notre foi catholique clairement exprimée et professée par le magistère de l’Eglise depuis dix-neuf siècles.
C’est pourquoi sans aucune rébellion, aucune amertume, aucun ressentiment nous poursuivons notre œuvre de formation sacerdotale sous l’étoile du magistère de toujours, persuadés que nous ne pouvons rendre un service plus grand à la Sainte Eglise Catholique, au Souverain Pontife et aux générations futures.
« S’il arrivait, dit saint Paul, que NOUS-MÊME ou un Ange venu du ciel vous enseigne autre chose que ce que je vous ai enseigné, qu’il soit anathème. » (Gal. 1, 8.)
N’est-ce pas ce que nous répète le Saint-Père aujourd’hui ? Et si une certaine contradiction se manifestait dans ses paroles et ses actes ainsi que dans les actes des dicastères, alors nous choisissons ce qui a toujours été enseigné et nous faisons la sourde oreille aux nouveautés destructrices de l’Église.
On ne peut modifier profondément la « lex orandi » sans modifier la « lex credendi ». A messe nouvelle correspond catéchisme nouveau, sacerdoce nouveau, séminaires nouveaux, universités nouvelles, Église charismatique, pentecôtiste, toutes choses opposées à l’orthodoxie et au magistère de toujours.
Cette Réforme étant issue du libéralisme, du modernisme, est tout entière empoisonnée ; elle sort de l’hérésie et aboutit à l’hérésie, même si tous ses actes ne sont pas formellement hérétiques. Il est donc impossible à tout catholique conscient et fidèle d’adopter cette Réforme et de s’y soumettre de quelque manière que ce soit.
La seule attitude de fidélité à l’Église et à la doctrine catholique, pour notre salut, est le refus catégorique d’acceptation de la Réforme.
C’est pourquoi nous nous en tenons fermement à tout ce qui a été cru et pratiqué dans la foi, les mœurs, le culte, l’enseignement du catéchisme, la formation du prêtre, l’institution de l’Eglise, par l’Eglise de toujours et codifié dans les livres parus avant l’influence moderniste du concile en attendant que la vraie lumière de la Tradition dissipe les ténèbres qui obscurcissent le ciel de la Rome éternelle.
Ce faisant, avec la grâce de Dieu, le secours de la Vierge Marie, de saint Joseph, de saint Pie X, nous sommes convaincus de demeurer fidèles à l’Eglise Catholique et Romaine, à tous les successeurs de Pierre, et d’être les « fideles dispensatores mysteriorum Domini Nostri Jesu Christi in Spiritu Sancto ». Amen.
Mgr Marcel Lefebvre