Notre lettre 178 publiée le 19 mai 2009
Saint-Germain en Laye, un scandale instructif quant à l’obstruction au Motu Proprio : dans le diocèse de Versailles, Monseigneur Aumonier bloque la situation
La manière dont a été traitée la demande d’application du motu proprio dans la paroisse de Saint Germain en Laye - diocèse de Versailles – nous éclaire sur les raisons des blocages et des exclusions qui demeurent dans ce diocèse et dont Paix Liturgique s’est déjà fait l’écho (Bougival, Louveciennes, ND de Versailles, Maisons-Laffitte et Rambouillet…).En voici les éléments.
1 - Les faits
Dès septembre 2007, environ 300 fidèles de Saint Germain se constituent spontanément en groupe en vue de demander la mise en œuvre dans leur paroisse des bienfaits du Motu Proprio. Ils s’adressent en ce sens au Père Bot, curé de leur paroisse.
Une première rencontre, organisée le 27 septembre 2007, fut l’occasion pour le Père Jean-Marc Bot de faire un très bon accueil a priori à la demande.
Quelques jours après, le 9 octobre 2007, les demandeurs apprirent que selon le Père Bot, « la demande est mal perçue et accueillie froidement par le Conseil paroissial, notamment en raison des événements de Port-Marly de 1986/1987 encore présents dans la mémoire des gens ».
Le 30 novembre 2007, une rencontre suivie d'un pot a lieu entre les demandeurs (40 familles représentées), le curé de Saint Germain en Laye, quatre membres du Conseil Paroissial de St Germain et une cinquième personne impliquée au sein de l'équipe liturgique de la Paroisse.
Il ne fut hélas pas possible aux demandeurs de rencontrer tout le Conseil pourtant présenté comme le principal obstacle à la réconciliation.
Mais les réactions des fidèles furent très positives - rappelons en quelques unes :
- Je trouve que notre rencontre ne pouvait pas mieux se passer. Souhaitons qu'elle n'en reste pas là.
- Pour notre part, mon épouse et moi avons été satisfaits de la réunion, du climat dans lequel elle s'est déroulée.
- Le fait notamment de ne pas entrer dans une logique intellectuelle, d'arguments et de contre-arguments, mais de faire appel au vécu des gens, à leur ressenti, à leur besoin, contribue à dépassionner les choses.
- Il nous a semblé que les membres présents du conseil paroissial étaient pour le moins bienveillants à l'égard de notre démarche.
- Le Père Bot, au cours du pot, nous est apparu comme un prêtre bien formé et très sûr au plan dogmatique, notamment sur des sujets généralement absents des préoccupations des paroisses : fins dernières, monde invisible (anges, ...) Nous en avons été très heureux !
Des réunions informelles se succédèrent ensuite jusqu'en janvier 2008.
C’est ainsi qu’après des espoirs réaffirmés par le père Bot et tout en sachant que le processus serait long, la décision de ne pas mettre en œuvre le motu proprio fut annoncée publiquement lors des Messes dominicales des 16/17 février 2008.
Citons ici un témoin de l'événement : « A la fin de la messe, le père Bot a annoncé qu'il n'y aurait pas à Saint Germain de messe selon la forme extraordinaire du rite romain car les prêtres de la paroisse étaient trop chargés et ne désiraient pas dire cette messe. Il a également évoqué le fait qu'il y avait une campagne de battage faite autour de cette demande en vue d'attirer des gens extérieurs à Saint Germain ».
Cette annonce entraîna des applaudissements de certains paroissiens manifestement « déjà au courant » de celle-ci.
Nombre de fidèles furent choqués de cette annonce, de sa forme brutale et de la réaction méchante d'une partie de l'assistance.
Les demandeurs quant à eux étaient « estomaqués » de cette décision rapide, brutale et non conforme à la vérité puisqu’ils n'avaient alors fait aucune publicité et encore moins de « battage » et alors que tout laissait croire qu'une réconciliation fructueuse, quoique difficile était engagée…
Pour sortir de cette impasse, avec l'accord de leur curé, les demandeurs se tournèrent vers leur évêque, Monseigneur Eric Aumonier, évêque de Versailles.
Ce dernier les reçut le 17 mai 2008.
Lors de cette rencontre Mgr Aumonier rappela que le modèle d'application du Motu Proprio qu’il souhaitait pour son diocèse était l’accueil des demandes dans le cadre des paroisses. Il leur enjoignit ainsi de revenir vers leur curé.
Au début de l'année paroissiale 2008/2009, les demandeurs, qui regroupent alors plus de 55 familles, se retournent une nouvelle fois vers leur curé le père Bot pour trouver une solution.
Le 12 octobre, lors d’un entretien, le Père Bot adresse aux demandeurs une fin de non recevoir : « La demande est entendue mais il n'est pas possible de la satisfaire ». « Les prêtres ne sont pas désireux de célébrer cette messe ». « Aucun lieu sur les 6 lieux envisagés à Saint-Germain n’est disponible ».
Sachant le caractère inexact de ces réponses, les fidèles renouvèlent leur demande le même jour au père Bot en précisant que leur "insistance" vient de l'évêque lui-même qui les a incités à poursuivre leur démarche auprès de leur curé.
Le 16 novembre 2008, le Père Bot répond que son refus d'accorder une célébration dans la forme extraordinaire est désormais lié au fait que les demandeurs ne constitueraient qu'une "petite minorité" qui disposerait d'autres options dans les environs de Saint Germain. Pour conclure le père Bot demande : « Je vous prie donc de ne plus poursuivre vos pressions extrêmement insistantes en vue d'obtenir satisfaction. Ce serait désormais inutile et inapproprié ».
Ne restait plus donc aux demandeurs qu’à s'adresser à la commission Ecclesia Dei chargée par le Saint Père lui-même de régler les cas difficiles.
Toutefois, ne voulant pas renoncer au dialogue dans leur paroisse, les fidèles maintinrent les contacts avec leur curé. Ils lui expliquèrent notamment ne pas comprendre de se voir reprocher d’insister alors que cette insistance se faisait sur les conseils de l'évêque. Les demandeurs rappelèrent également à leur curé que bien que minoritaires - ils ne sont à ce moment que 60 familles représentant près de 400 fidèles ! - ils ont le besoin d'être aimés et respectés comme les autres paroissiens. Ils insistèrent une nouvelle fois sur leur désir de rencontrer le conseil paroissial qui, officiellement, a été à l'origine de leur exclusion…
Quelques jours après, le 2 février 2009, le père Bot leur envoie un nouveau courrier encore plus étonnant que le précédent. Nous le reproduisons " in extenso" :
"En réponse à votre dernière lettre je vous confirme que ma position n'a pas changé et ne changera pas.
1 - Aucun prêtre n'est obligé de célébrer selon le rite Extraordinaire
2 - Aucun prêtre de Saint Germain n'est disposé à le faire de lui-même
3 - Les prêtres de Saint Germain ne souhaitent pas faire appel à un prêtre extérieur, ni supprimer une messe existante
4 - Notre évêque ne propose rien et ne nomme personne pour ce service
Résultats : le Statu Quo. C'est tout !
Inutile de continuer à écrire des lettres : ma réponse sera la même"
Jean-Marc Bot
La situation étant apparemment dans une impasse, les demandeurs n’ont plus eu d’autre choix que d’aller solliciter directement l’avis des paroissiens pour savoir ce qu’ils en pensaient réellement.
Ainsi, au début du mois d'avril 2009, les demandeurs ont diffusé dans la paroisse une enquête d'opinion dont les résultats ont été stupéfiants : cette sollicitation directe des paroissiens a permis de toucher d’autres familles intéressées portant le groupe de demandeurs à 75 familles, c'est-à-dire au moins 450 fidèles dont plus de la moitié sont des paroissiens réguliers de la paroisse de Saint-Germain en Laye.
2 - L'affaire se dénoue : Le courriel du 6 avril 2009
Le 6 avril 2009, après une longue conversation qu'il a eue avec des fidèles à la sortie d'une messe de Saint Germain, le père Bot, adresse aux demandeurs un courriel pacifiant mais très éclairant :
"Comme vous l'avez sans doute compris, l'interlocuteur pour vous est désormais Mgr Aumonier, et non le conseil pastoral de la paroisse de St Germain en Laye. La seule possibilité qu'une messe en rite extraordinaire soit célébrée régulièrement à St Germain-en-Laye dépend de la venue d'un prêtre extérieur à nos deux paroisses. Pour que cette venue éventuelle soit acceptée sans contestation, aussi bien par le clergé que par les fidèles, il est indispensable que l'autorité de notre évêque y soit engagée officiellement et que Mgr Aumonier règle les modalités de lieu, de temps, de collaboration, avec moi-même et le Père Hoffmann. Le jour où cela se produira vous aurez obtenu satisfaction".
La satisfaction de la demande énorme de Saint Germain n’est donc pas de la compétence du curé de la paroisse. C’est bel et bien Mgr Aumonier l'évêque de Versailles qui décide de ne pas appliquer le Motu proprio du Pape.
Étonnant en 2009, à l’heure du Motu Proprio de 2007, que Mgr Aumonier se place lui-même et place tous ses vicaires, ses prêtres, ses paroisses et ses chapelles, et tous ses fidèles dans l'esprit et dans la lettre du motu proprio de 1988 !
Les curés des paroisses du diocèse de Versailles sont dans une situation inconfortable : officiellement libres et responsables de leurs choix, ils n'ont en réalité aucun droit et aucune possibilité réelle - les faits le démontrent - de répondre aux attentes légitimes de leurs paroissiens.
Il suffisait de le dire, d’assumer clairement que l’autorité ne souhaitait pas appliquer le Motu Proprio de 2007 et tolérait simplement une application parcellaire de celui de 1988. Ainsi, les demandeurs se seraient adressés directement à l'évêque et non pas à des prêtres aux pieds et mains liés, des prêtres non libres d'appliquer la réconciliation et la charité généreuse à laquelle appelle le St Père.
On comprend dès lors mieux pourquoi malgré des dizaines de demandes dans le diocèse de Versailles, quelles que soient les situations, rien n'y fait !
On comprend dès lors mieux pourquoi aucune demande n’a été acceptée ni aucune messe dominicale hebdomadaire dans une paroisse mise en place dans le diocèse de Versailles depuis la promulgation du motu proprio de juillet 2007 : soit bientôt deux ans ; ceci en dépit de demandes extrêmement nombreuses, sérieuses et constituées !
Ce simple constat montre très clairement que les fidèles sont confrontés dans ce diocèse à une politique organisée de refus d'appliquer les mesures de paix du Saint Père.
3 - Les réflexions de Paix Liturgique
A - A Saint Germain comme à Rambouillet, ce n'est pas le petit nombre des demandeurs qui justifie le blocage du dossier. Ici, ils étaient plus de 300 à l'automne 2007 et plus de 450 aujourd'hui et pourtant cela n'empêche pas le curé de considérer le processus comme définitivement interrompu.
B - A Saint Germain comme à Poissy, ce n'est pas parce que les demandeurs ont fait publicité de leur demande que celle-ci est rejetée. Au contraire, à Saint Germain comme à Rambouillet les demandeurs ont accepté de rester extrêmement discrets pour éviter - du moins le croyaient ils - de brusquer le curé et les fidèles et de compromettre ainsi leurs chances de succès.
Pourtant cela n'empêche pas les curés de considérer le processus comme définitivement interrompu.
C - A Saint Germain comme à Versailles ou Poissy, les clercs instrumentalisent les conseils paroissiaux, véritables « boucs émissaires », qui finissent par apparaître comme les responsables de l'exclusion alors qu'à la vérité, le seul pouvoir appartient à l'évêque.
L’affirmation mensongère que ce sont les conseils paroissiaux qui bloquent tout, permet à nos pasteurs de paraître justes et innocents tout en poursuivant leur politique d’apartheid.
D - Dans le diocèse de Versailles comme dans le diocèse de Paris, c’est le clergé qui impose la Guerre Liturgique.
La grande révélation de ce dossier est l'aveu, on ne peut plus explicite du Père Bot, qu'il n'est pas maître du jeu dans sa paroisse au sujet de l'application du Motu Proprio "Summorum Pontificum" mais qu'il est tenu de se soumettre en cette matière aux décisions de son évêque.
Est-ce l'esprit et le sens pratique du motu proprio qui affirme clairement que ce sera le curé de la paroisse qui jugera de l'opportunité d'appliquer celui-ci avec bienveillance ?
Le clergé français commence doucement à appliquer le Motu proprio de 1988 de Jean Paul II, encore ne le fait il même pas de manière « large et généreuse » comme les y invitait pourtant ce grand Pape…
Bien sûr nos évêques ne sont pas les seuls responsables. De nombreux vicaires généraux, curés de paroisses et laïcs – tous soucieux de conserver leurs privilèges et leur monopole – collaborent avec zèle à la politique d’apartheid liturgique.
Évoquons rapidement ici ce vicaire épiscopal d'un diocèse de l'ouest parisien qui se vantait en public de mener avec les "tradis" la « politique de l'élastique » : « Je refuse tout, disait-il, puis au moment ou excédés, les "tradis" vont exploser et se plaindre à Rome, je lâche un peu en apparaissant alors comme un vrai "ami" des tradis…»
Évoquons aussi tel autre dans les Yvelines qui écrivait scandaleusement dès novembre 2007 que la volonté du St Père n'était pas d'étendre la pratique de la forme extraordinaire du rite malgré les propres paroles de Benoît XVI : « Dans les paroisses où il existe un groupe stable de fidèles attachés à la tradition liturgique antérieure, le curé accueillera volontiers leur demande de célébrer la Messe selon le rite (…) de 1962 ». Si ce n'est pas un souhait d'extension qu'est-ce donc ?
Citons ailleurs le cas de ce cardinal d'un grand diocèse d'Ile de France qui se sert lui aussi de son ancien vicaire général pour exécuter ses bases besognes avec cynisme, basses besognes que l'abbé en question est prêt à assumer dans l'espoir d'une prochaine promotion mitrée… pendant que le cardinal peut apparaître comme blanc et innocent auprès du Nonce apostolique ou de la commission Ecclesia Dei ?
Quel gâchis que cette vilénie cléricale alors que le St Père pousse à la réconciliation et que nous savons par les lettres que nous recevons que les fidèles des deux bords y sont prêts et qu'ils la souhaitent !
Non, ce double jeu n'est plus possible et désormais nous publierons régulièrement les détails de ces dossiers incompréhensibles.