Notre lettre 1175 publiée le 14 mars 2025

LES CONTRADICTIONS DE MGR WINTZER :

LE POURFENDEUR D'ABUS

CONCÉLÈBRE AVEC UN PRÊTRE

EXCOMMUNIÉ... POUR ABUS !

FAITES CE QUE JE DIS...

... MAIS PAS CE QUE JE FAIS !

Le 6 octobre dernier, les fidèles du diocèse de Sens-Auxerre regardaient avec sidération l’installation de leur nouvel archevêque, Mgr Wintzer. Mgr Wintzer, obsédé par la question des abus – dont l’horreur est incontestable, mais dont l’utilisation démagogique est assez suspecte –, et qui en 2023 avait écrit un livre où il appelait à tirer les leçons de la CIASE, enfonçait le clou dans l’homélie de son installation : « le cri des victimes, la CIASE, ce qu’on apprend sur l’abbé Pierre, ne peut être sans conséquence sur le fonctionnement de l’Église catholique ». Et tout en disant cela, dans cette messe, il concélébrait avec un prêtre sous le coup d’une excommunication pour abus sexuels, condamné par la justice canonique, dont les recours avaient été rejetés. Et il avait précédemment validé sa réintégration en catimini du prêtre toujours excommunié.


Mgr Wintzer : faites ce que je dis…

Mgr Wintzer avec ses positions iconoclastes, coqueluche des catholiques de gauche – notamment car il veut des prêtres mariés et salariés de leurs paroisses, est l’évêque le plus méritant selon Golias qui lui attribue cinq mitres dans le Trombinoscope paru en décembre 2024, et qui multiplie avec une servilité quelque peu inhabituelle les passages de brosse à reluire. Ainsi, dès le début de son portrait page 143, « la nomination de Pascal Wintzer en Bourgogne n’est ni un déclassement, ni la reconnaissance romaine que l’ancien archevêque de Poitiers aurait failli à sa tâche. Au contraire, l’homme est non seulement attachant, mais capable de moments de lucidité sur laui-même qui pourraient inspirer ses détracteurs si ces derniers avaient la foi ».

Ou encore, page 146, « Wintzer, lui, ne sera jamais un anonyme, mais il reste un homme d’une grande pudeur, pas assez connu, ni reconnu. Il a le goût littéraire sûr, exemple avec Lola Lafon et son dernier ouvrage : Quand tu écouteras cette chanson (Stock, 2022), qu’il conseille et qui est effectivement très recommandable. Il incarne à sa façon ce que dit le pape François sur la nécessité des bienfaits de la lecture ».

Et un peu plus loin, son passage sur la Vie des Diocèses du 14 novembre 2022, au sujet de sa prise en compte de la CIASE et de la crise des abus, tient toute une page : « Wintzer a été ébranlé par la crise des abus et les révélations sans fin de prêtres ou d’évêques abuseurs. Cette fois, il ne louvoie plus, il met les pieds dans le plat […]Alors que les évêques veulent tourner la page des abus, par lassitude et par envie de passer à autre chose, Pascal Wintzer s’insurge : « Moi-même, je me souviens avoir exprimé une telle pensée, il y a trois ans, à propos des "affaires". Aujourd’hui je considère que je n’ai plus le droit de le dire. Ces drames sont révélateurs de dysfonctionnements que nous devons à tout prix corriger pour être en phase avec la mission et prendre le mal à la racine. Les victimes ne peuvent pas tourner la page. Et nous n’avons pas le droit de les abandonner. ».


Mais pas ce que je fais…

Patatras ! Deux semaines après que les bonnes feuilles du Trombinoscope commencent à paraître ça et là dans la presse catholique, Natalia Trouiller, figure journalistique de la cathosphère, spécialisée dans la lutte contre les abus sexuels du clergé, abusologue dira-t-on, met les pieds dans le plat sur Twitter.

Il se trouve que le diocèse de Sens-Auxerre, comme bien d’autres, compte quelques prêtres auteurs d’abus. Et Mgr Wintzer en a hérité.

« Nous sommes donc dans l'archidiocèse de Sens-Auxerre, le 20 mars 2017. [Mgr Giraud] en est alors l'archevêque. Il reçoit un mail. Une femme, victime entre 14 et 18 ans d'un prêtre qui commet sur elle des agressions de plus en plus graves. Il prend immédiatement [rendez-vous] avec elle. 

Jean T., c'est une "figure" du diocèse. Un curé charismatique, sympa, toujours le mot pour rire, serviable, avec des homélies qui font mouche, ah s'il y avait plus de prêtres comme lui les églises seraient pleines.

N'empêche que ce que Mgr Giraud entend ce jour-là est horrible. Ainsi, la victime raconte comment, à la fin de la dernière agression, Jean T lui a expliqué en substance qu'elle ne pourrait pas communier à la messe qu'il s'apprêtait à célébrer, vu ce qu'ELLE venait de faire. Qu'il fallait donc qu'il la confesse avant

Ça porte un nom, ça. En droit canonique, ça s'appelle "absolution du complice". Le terme n'est pas terrible, mais la réalité, c'est qu'un prêtre qui fait ça est excommunié latae sententiae. Automatiquement.

Pas besoin de procès : c'est tellement grave que l'acte comporte en lui-même sa condamnation. Mgr Giraud déclenche immédiatement les procédures, étatique et canonique. Il avertit la procureure de Sens. Une enquête est lancée ».

Sur le plan de la justice civile, l’affaire est classée pour cause de prescription. Mais convoqué par son évêque, le prêtre reconnaît d’autres faits – il a fait des attouchements graves sur majeure. Natalia Trouiller publie sur son fil les comptes-rendus des juridictions canoniques – le 26 février 2020, l’officialité de Paris juge l’abbé Jean Tribut coupable d’abus sur mineure, confirme l’excommunication et le condamne à cinq ans de privation de ministère.

Comme le rappelle Natalia Trouiller, l’excommunication est une sanction médicinale – elle peut être levée si le mis en cause se repent sincèrement. Et la privation du ministère est une sanction canonique pénale.

« Le raisonnement des juges, c'est de dire: Si jamais Jean T. se repent dans les 5 années à venir, il faudra encore qu'il purge sa peine avant d'être pleinement réhabilité. Sauf que Jean T. ne s'est pas repenti. Au contraire. D'abord il a fait appel.

L'instance suivante, c'est le Dicastère pour la Doctrine de la Foi (DDF) à Rome. Il dépose un recours. Ensuite, il hurle dans tout le diocèse à la persécution. Il se garde évidemment bien d'évoquer les vraies raisons de sa disgrâce ».

Alors qu’en septembre 2021, faute de prêtre, Mgr Giraud se retrouve administrateur d’une paroisse, des fidèles sur la page Facebook du diocèse l’accusent d’avoir suspendu l’abbé Jean Tribut à tort : « ce que je reproche à cet évêque, c’est son manque d’empathie […] il a utilisé l’éviction du père Tribut sans en avoir au préalable parlé avec lui et le confronter avec la personne qui a proféré des mensonges ». Plus bas, un autre : « l’évêque a écouté le témoignage d’une femme en dépression nerveuse qui a accusé Jean de choses fausses ».

Sauf que les faits, sont établis, et la Congrégation (aujourd’hui Dicastère) pour la Doctrine de la Foi rejette le recours, confirmant la peine d’excommunication, et ramenant la privation du ministère à deux ans : « le 30 octobre 2020, le DDF confirme la culpabilité, l'excommunication et la privation de ministère, ramenant à deux ans au lieu de 5, en considérant que comme Jean T. est suspendu depuis 2017, dans 2 ans les 5 ans seront accomplis ». Le mis en cause n’accepte toujours pas et fait un ultime recours, rejeté par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi le 23 septembre 2021.

Natalia Trouiller continue son récit : « D'ailleurs Jean T n'accepte toujours pas sa condamnation. Son fan-club, dans le diocèse, continue de traîner l'évêque et la victime dans la boue. Au point que Mgr Giraud envisage de publier les sanctions ». Mais son vicaire judiciaire l’en dissuade. Pourtant, selon nos informations, la situation devient compliquée, l’évêque est régulièrement pris à partie dans ses déplacements, alpagué, menacé parfois. Au point qu’il finit par être volontaire pour n’importe quel poste pour être exfiltré de Sens-Auxerre. C’est avec un soulagement notable qu’il reçoit le siège de Viviers sans titulaire depuis le départ de Mgr Balsa et rentre chez lui retrouver les siens…

Alors que ses nouveaux anciens fidèles offrent à Mgr Giraud une poule pour cadeau de bienvenue, l’abbé Tribut ne désarme pas et « fait le siège du vicaire général, devenu administrateur diocésain : le père Joël Rignault [administrateur diocésain]. Celui-ci ne résiste pas longtemps. Il réintègre Jean T ».

Ce qu’il n’avait évidemment pas le pouvoir de faire. Mgr Wintzer, à son arrivée, aurait du rétablir la situation et interdire à l’abbé Tribut de célébrer, en application de la décision de privation de sa charge curiale par la Congrégation de la Doctrine de la Foi publiées par son prédécesseur… Mais il n’en est rien.


Mgr Hérouard, l’évêque qui lave plus blanc, concélèbre deux messes illicites en deux mois

Pis, à son installation le 6 octobre, « l’abbé Jean T, tout content, concélèbre ». En présence du nonce Mgr Migliore, de Mgr Hérouard, spécialiste des mises à pied d’évêques « de droite », de NNSS Drouot (Nevers), Rivière (Autun), Blaquart (Orléans), Lebrun (Rouen), Kalist (Clermont-Ferrand), Bestion (Tulle, mais déjà nommé alors à Blois), et des évêques émérites. Tous participants à une messe illicite en application du droit canonique, le concélébrant illicite viciant l’ensemble de la célébration.

Puis à nouveau lors de la messe des funérailles de Mgr Gilson le 2 décembre, toujours en présence de Mgr Hérouard –« deux messes illicites en deux mois, c’est presque de la gourmandise ! », s’exclame Natalia Trouiller. C’est vrai que pour un évêque qui inspecte d’autres diocèses en reprochant à ses collègues évêques de manquer de discernement, cela fait désordre… Mais aussi de Mgr Vuillemin, évêque du Mans, de Mgr Cador (Coutances) et d’autres. « Mgrs Giraud et Wintzer étaient là aussi. Une petite souris de sacristie m'a raconté que lorsque Giraud a vu Jean T en train de revêtir sa chasuble, il a eu une explication virile avec Wintzer. Qui l'a envoyé aux fraises. Quelles sanctions pour Mgr Wintzer, M. le nonce ? ».


Errare humanum est, perseverare diabolicum

Natalia Trouiller décide de prévenir le nouvel évêque de Sens-Auxerre : « j'appelle donc Mgr Wintzer, persuadée que c'est un malentendu. Je tombe sur un évêque qui me semble soucieux de bien faire, un peu perdu dans les méandres du droit canonique (comme beaucoup).

Il me donne son interprétation: Rome a réduit l'excommunication à 2 ans. Je lui explique que ce n'est pas possible: la condition pour lever une excommunication, c'est la résipiscence du coupable. On ne peut pas la réduire comme ça. C'est implicite dans le texte parce que pour un canoniste, c'est évident. Ou ça devrait. Il n'est pas convaincu ».

Ils conviennent d’écrire au Tribunal Pénal Canonique National – compétent en matière d’expertise canonique pour les responsables d’Église, qui confirme le 16 décembre que l’abbé Tribut est bien excommunié. Mais le 18 décembre, Mgr Wintzer écrit à Natalia Trouiller que « la peine d’excommunication n’est pas confirmée » et qu’il n’est, selon lui, « pas interdit à Jean Tribut de célébrer les sacrements […] ce qui avait conduit, pendant la vacance du siège épiscopal, qu’il soit sollicité pour des célébrations dans le doyenné d’Auxerre. Arrivant dans le diocèse le 6 octobre, je n’ai pas remis en cause cela. On m’a confirmé que je n’avais pas à le faire. Je lui ai cependant demandé de rester dans le sud du département de l’Yonne et de ne pas célébrer au nord ».

Du coup Natalia Trouiller rappelle le TPCN, qui tombe de l’armoire, rappelle Mgr Wintzer, qui s’obstine et demande confirmation au Dicastère pour la doctrine de la Foi. Le 19 décembre il répond à Natalia Trouiller qu’il a « consulté les canonistes compétents à ce sujet. Ils m’ont confirmé que les sanctions étaient celles dont je vous ai part ». Et le Dicastère de la Doctrine de la Foi confirme l’excommunication.

Mais Mgr Wintzer s’obstine. Et pendant ce temps l’abbé Tribut continue de célébrer des messes, devant des fidèles loin de se douter de leur caractère illicite. A Noël, constate la presse locale, il célèbre à Augy, un village qui est loin d’être « le sud de l’Yonne déclassé », relève Riposte Catholique, puisque l’église est à 5.5 km de la cathédrale d’Auxerre à vol d’oiseau et fait partie de la paroisse d’Auxerre.

Pis, l’administrateur diocésain redevenu vicaire général, explique à la presse locale qu’il n’y a aucun problème – alors même que le Dicastère de la Doctrine de la Foi a bien confirmé l’excommunication. Mais ça aussi, les fidèles ne le savent pas : « à ce jour, le diocèse de Sens-Auxerre ne confirme pas l’excommunication latae sententiae de l’abbé et la concélébration de messes. « On attend encore des réponses, car il y a des interprétations canoniques… Il ne célèbre pas, car tout n’est pas finalisé… », balaye le vicaire général Joël Rignault. Quant à l’archevêque Pascal Wintzer, il n’a pas répondu à nos nombreuses sollicitations ».

En fin de compte, Mgr Wintzer s’obstinera encore deux semaines, explique Natalia Trouiller : « nous sommes peu avant Noël, Wintzer a eu confirmation de l'excommunication de Jean T par le DDF. Au-dessus, c'est Dieu. Il faudra attendre le 4 janvier pour qu'il cède et signifie à l'olibrius que cette fois, la fête est terminée. J'imagine que Rome est intervenue ».

Et il lui faut encore dix jours pour mettre les mots sur sa bévue : le 14 janvier il écrit aux « acteurs du diocèse ». Et ce cinéphile habitué des critiques de films pour l’Observatoire Foi et Culture – il n’a pas trouvé le temps de répondre à la presse sur le cas de l’abbé Tribut, mais a regardé le film Conclave, fait enfin le nécrologue de son film épiscopal : « j’ai obtenu la certitude que Jean Tribut était sous le coup d’une sanction, qui demeurait : le Dicastère pour la doctrine de la Foi a porté une sentence d’excommunication. Je lui ai confirmé de vive voix au mois de décembre, rappelant qu’il ne pouvait, en conséquence, célébrer les sacrements ».

Ce qui ne l’a visiblement pas empêché de célébrer à Noël. Bref, il a fallu « un mois. Un mois de bras de fer pour qu'un évêque applique une sanction canonique déjà appliquée par son prédécesseur. C'est à hurler. Comme si obtenir des sanctions n'était pas déjà assez difficile, maintenant il faut faire le JAP. Mais vous voulez la mort de l'Église ? ».

En revenant sur son installation, Paix Liturgique avait vu juste : « après avoir tout bradé à Poitiers et s'être glorifié devant ses proches d'avoir une armoire dans son bureau avec les « casseroles » de ses prêtres, notamment en matière d'abus, de vols, de destructions – un de ses prêtres a fait pulvériser des confessionnaux Renaissance à coups de hache – Mgr Wintzer est transféré à Sens-Auxerre, et pourra reconstituer une armoire ».

Heureusement que Mgr Wintzer avait cinq mitres sur Golias … Golias justement, en présentant la province ecclésiastique de Dijon, écrivait plein d’optimisme au sujet du nouveau titulaire de Sens-Auxerre : « la seule Bonne Nouvelle, c’est l’arrivée dans l’Yonne de Pascal Wintzer, qui cherche à se renouveler dans son ministère épiscopal et succède ainsi à Hervé Giraud parti dans l’Ardèche. Wintzer va découvrir un diocèse qui ne dispose pas de beaucoup de moyens, mais où il va pouvoir insuffler, expérimenter, impulser. Il s’est beaucoup bonifié avec le temps, le grand Pascal. La crise des abus lui a ouvert les yeux sur les impasses du système ecclésial actuel. On attend, avec une certaine impatience, de le voir au travail ».

On a vu, et on n’a pas été déçus ! Mais comme, à la différence de tel évêque du Midi de la France, il n’a pas ordonné plus de 160 prêtres en un quart de siècle d’épiscopat, ce qui serait carrément suspect, Mgr Wintzer ne sera pas inspecté par son métropolitain Mgr Bœuf-Carottes (Bœuf Carottes = la police des polices – surnom de Mgr Hérouard par le même Golias)

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